COSMODROME POUR UN POETE

Le dîner se termine. C'est décidé. Je quitte ce soir
les arômes, les nourritures, les breuvages
égayants de Provence,
et les garrigues qui à midi encore
diffusaient le péan des insectes,
faisaient des libations d' or et de miel.

Monde advenu par la faveur des dieux les plus beaux,
et pourtant monde rongé,
monde muré, enchaîné
au plomb grave des bornes et des nombres,
aux secondes dévorées et qui tuent
au plain-chant des ruminations lasses,
tu achèves ta carrière
sous le rictus jaune du soleil.


Je m' obstine à partir. Même  l' éclaircie
au milieu de l' herbe létale
doit se résigner  à l' infamie
des hordes incultes.
Dans le cirque aux sept montagnes sacrées
m' attend un vaisseau venu pour moi d' outre-temps.

Minuit approche
- l' heure du départ-
les dieux déjà expirent.
L' invention, la ferveur prostituées
les avaient repoussés.
Mais le divin est un puit qui ne se tarit point.
Avec pour tout bagage
l' urne funéraire de Phénix
vers un astre-refuge
solitairement
il me faut m' élever.