HYMNE DE JUL ( extrait de "SUR UNE PLUS HAUTE TOUR" Maison Rhodanienne de Poésie 1997), par Gérard MANTION
J'aime le bleu moiré des corps dans la nuit,
les chaudes transfigurations de l' ombre,
le roulis noir craquelant la pensée,
farouche berceuse d' écume où je m' étends,
les yeux fermés, à l' affût de l' éclaircie.
Je sens fuser en moi des reins d' Aphrodite
le don achevé des sommets qui m' enfantent.
Douce nuit, sainte nuit où je viens
au monde enfin après une longue vie
sans prodiges, sinon de labours peu féconds
Que tes peuples chantent très fort ma naissance,
ô mer nocturne, ô mer matricielle!
Soufflez. trompes marines, de gloutons soleils
sur les grands chemins d'eau qui se désembrument.
Me voici dégustant les pousses du futur.
Avec moi, vivants de la haute mer, entrez
dans la ronde de chair qui doit me couronner
le fier compagnon des bêtes et des choses,
peut-être de quelques hommes de noblesse,
rencontrés dans l' asile d' un sanctuaire.
Nous serons enthousiastes, car un dieu
nous habite, venu du sol de notre coeur
quand nous combattions encor dans les forêts
desséchées de haine, dans les carcasses
cendreuses des gloires et fastes du temps passé.
Nous formerons une phalange de prêcheurs
sans autre bible que notre verbe d' hommes
pour dire aux foules perverties de vapeurs
que l' éternité du monde est la fortune
des seuls violents prophètes de la beauté.